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19 enfants, 2 professeurs, 0 conséquences.

  • Alexandria Aniyah Rubio avait 10 ans.
  • Alithia Ramirez avait 10 ans.
  • Amerie Jo Garza avait 10 ans.
  • Annabell Guadalupe Rit 10 ans.
  • Eliahna Torres avait 10 ans.
  • Ellie Garcia avait 10 ans.
  • Eva Mirelesit 44 ans.
  • Irma Garcia avait 48 ans.
  • Jacklyn Jaylen Cazares avait 10 ans.
  • Jailah Nicole Silguero avait 11 ans.
  • Jayce Carmelo Luevanos avait 10 ans.
  • Jose Flores avait 10 ans.
  • Layla Salaza avait 1 ans.
  • Maite Yuleana Rodriguez avait 10 ans.
  • Makenna Lee Elrod avait 10 ans.
  • Miranda Mathis avait 11 ans.
  • Nevaeh Bravo avait 10 ans.
  • Rogelio Torres avait 10 ans.
  • Tess Marie Mata avait 10 ans.
  • Uziyah Garcia avait 10 ans.
  • Xavier Lopez avait 10 ans.

19 enfants et 2 professeurs américains assassinés. Dans leur propre pays. Dans leur école. Mais ces 21 tragédies ne suffiront quasiment certainement pas à forcer les « responsables » de l’extrême droite américaine à cesser leurs obstructions systématiques à toute réforme d’ampleur sur la détention d’armes.

Ils sont d’ailleurs déjà prêts et comme à chaque fois, dans une efficacité qui n’a d’égale que son ignominie, la machine médiatique et politique de guerre des défenseurs du port d’arme s’est mise en marche pour noyer les légitimes réactions d’effroi et les colères sous des prières rituelles et d’hypocrites appels à l’unité nationale. Broyant les rachitiques espoirs d’une réforme vitale de la législation, les élus et les électeurs du « Parti Républicain » ainsi que les lobbyistes des armes sont déjà à l’œuvre pour mentir et faire croire que le sang d’enfants qu’ils ont sur les mains n’est que du ketchup 100% made in USA et qu’ils n’ont absolument aucune responsabilité dans ce massacre.

Mais plutôt que de nous demander comment tenter de raisonner avec pareils cerveaux cyniques et malades, rappelons nous plutôt comment les USA en sont arrivés à considérer que le sacrifice inutile de centaines de ses propres enfants était moins important que le droit à porter… pardon à acheter des armes.

Commençons par établir que, en plus de l’amoralisme cynique rémunérateur qu’on retrouve dans toutes les sociétés capitalistes, la responsabilité est avant tout politique.

Les complicités sont nombreuses. Il y a tout d’abord des dizaines d’années de propagande de la droite extrême américaine mise au service des vendeurs d’armes pour leurs profits respectifs. Voulant s’assurer de juteuses rentrées financières et un large ensemble de votes acquis, le « Parti Républicain » a tout fait pour embrasser les guerres culturelles de ces généreux donateurs et flatter l’égo et les ressentiments d’électorats haineux ou malléables.

Ainsi a t’on pu assister ad nauseam à de longues, pathétiques et fainéantes campagnes politiques libertariennes et surtout intéressées qui n’avaient que pour but d’inscrire dans l’inconscient collectif de dizaines de millions d’américains que le port d’arme était un droit aussi sacré que la liberté. Tous les « arguments » ont été matraqués : la défense individuelle, la non confiance envers l’État, les représentations racistes de la criminalité, la valorisation de l’image du cowboy et de l’armée, … tout cela pour aboutir à un mythe monstrueux nourri par la paranoïa, les haines, les ressentiments et les peurs.

Et tant pis pour les milliers de morts d’innocents.

Bien sûr, rien de tout cela n’aurait été possible si les institutions politiques américaines n’étaient pas suffisamment dysfonctionnelles pour permettre à cette minorité d’électeurs d’élire suffisamment de représentants et de sénateurs, voire parfois une majorité par la magie du bidouillage légal électoral, pour bloquer toute réforme législative, y compris mineure, sur cette question. Ce verrou politique et législatif indépassable, sauf à éliminer électoralement le « Parti Républicain » dans suffisamment d’états ce qui est impossible aujourd’hui au vu des règles et des découpages électoraux ultra partisans et de la profonde fracture politique du pays largement entretenue par la droite pour se maintenir au pouvoir, rend toute possibilité de changement quasi impossible avant des dizaines d’années au mieux alors qu’une majorité d’américains y serait favorable. Democracy is so overrated comme on dit.

Alors tout est-il vraiment foutu sur ces questions pour les USA ?

Au risque de vous décevoir, je pense que oui et j’accompagne ma réponse laconique avec ce tweet de mon camarade de podcast Iznogoud qui résume tragiquement bien ce que je pense.

La seule chose que nous pouvons faire désormais de l’autre côté de l’Atlantique est d’observer pour ne pas reproduire les mêmes erreurs qui ont conduit à ce blocage qui provoquera encore et encore dans un cycle abominable toujours plus d’enfants, d’adolescents et d’adultes tués pour rien.

Pour ma part, j’en tirerais les leçons suivantes :

  • Les défenseurs des armes comme les libertariens sont des gens dangereux pour la sécurité collective y compris et surtout celle des plus fragiles. On ne se compromet pas avec eux ou leurs alliés, on les combats et exclue au maximum du champ électoral et politique.
  • Les institutions ne doivent pas permettre à une minorité d’électeurs de disposer d’une majorité. (Ex : le parlement français)
  • Il ne faut jamais autoriser le port d’arme et il faut punir et contrôler sévèrement. Les chiffres le prouvent, aucun pays n’a autant de meurtres de masses que les USA.
  • Il ne faut jamais cesser de combattre les guerres culturelles des ultras réactionnaires et des haines : les réécritures de l’histoire et des valeurs sont un poison à long terme.
  • La violence n’entraînant que la violence, la logique d’escalade (telle que celles voulue en France par des syndicats policiers d’extrême droite comme Alliance) nous amènera fatalement à plus de morts et plus de tragédies.

Nemo

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[TRADUCTION] Aukus Potus ou pourquoi Biden a sacrifié la France.

Le titre est de moi mais cet article est une traduction de cet article d’Electoral-vote.com : https://www.electoral-vote.com/evp2021/Senate/Maps/Sep20.html#item-7

Biden s’intéresse au Quad et non à la Squad *

L’un des rares domaines dans lequel un président américain peut agir de manière franche sans avoir à s’occuper du Congrès est la politique étrangère. Et l’une des forces de Joe Biden, ayant été 3 fois président et 36 ans membre de la commission des affaires étrangères du Sénat, réside dans sa connaissance des dossiers internationaux et non de la politique nationale. Ayant été 8 ans vice président d’un Barack Obama peu connaisseur ou même intéressé par la scène internationale, Joe Biden connaît aussi personnellement de nombreux leaders mondiaux. Ces derniers jours, les intentions de sa présidence sont claires : utiliser sa marge de manœuvre très étendue. Non seulement cela a pour effet de mettre sous le tapis le fiasco afghan mais cela contribue à définir un nouveau chemin pour les USA sur la scène mondiale.

La vente de sous-marins américains à l’Australie la semaine dernière a un impact bien plus énorme que ce que les premiers papiers pouvaient suggérer. Oui, la France est plus que vexée d’avoir perdu un contrat de 66 milliards de dollars et les emplois que cela aurait créés. Mais plus que cela, la France se voit toujours comme une puissance militaire mondiale (notamment maritime). La décision de Biden a dégonflé cette image de manière particulièrement rapide. La France possède bien quelques îles dans l’océan Pacifique mais cela n’en fait pas une puissance maritime mondiale pour autant.

Même si il y a eu des moments compliqués, la France et les USA ont une longue histoire en tant qu’alliés. D’un côté, sans l’aide de la France durant la guerre d’indépendance les pièces de monnaies auraient probablement été à l’effigie de la Reine et non de George Washington. De l’autre côté, pendant la Seconde Guerre Mondiale si les ricains n’avaient pas été là les Français vivraient en Germanie.** On peut donc estimer que la dette historique de l’indépendance a été remboursée en 1945 (et en 1918).

Le choix de faire un deal sournois avec les australiens (et de ne rien dire à la France jusqu’à la dernière minute) était clairement une décision de Biden. Ni le Ministre des affaires étrangères Antony Blinker, ni le ministre de la Défense Lloyd Austin, ni personne d’autre ne dispose de ce niveau de décision. Emmanuel Macron le sait ce qui explique en partie sa très forte réaction. En plus d’engendrer des non-créations d’emploi et d’abîmer l’image que la France a d’elle même en tant que nation internationale, Macron se sent trahi par Biden qu’il connaît pourtant bien. Biden comprend sûrement la douleur française mais, au bout du compte, il a fait ce qui était dans l’intérêt américain sans se laisser guider par son ressenti personnel. Cette méthode en elle même est un peu différence de la façon dont ses prédécesseurs fonctionnaient.

Ce que cet accord indique est que Biden voit en la Chine le plus grand pays rival des USA, et non la Russie, et que la prochaine bataille entre démocraties et régimes autoritaires se fera dans le Pacifique et non dans l’Atlantique. Autrement dit, même si il ne veut pas abandonner l’Europe, Biden estime que les plus grands enjeux sont dans le Pacifique et en Asie. C’est pour cette raison qu’il veut avertir la Chine qu’elle ne fera pas ce qu’elle veut dans cette région. Les sous-marins français que l’Australie allait acheter fonctionnaient au diesel, ils ont une zone de déplacement limitée (il faut recharger en carburant régulièrement) et font beaucoup de bruits ce qui en fait des cibles facilement repérables et coulables pour l’armée chinoise. Les sous-marins américains sont des sous-marins nucléaires dernier cri. Ils sont silencieux et peuvent s’approcher des côtes chinoises sans se faire repérer. On ne sait en revanche pas si ils sont capables de tirer des missiles nucléaires car c’est une information secret défense et les américains ne dévoilent jamais où sont leurs missiles nucléaires. Mais même si ils ne sont pas armés de façon nucléaire, les sous-marins transporteront au moins des missiles offensifs. Cela signifie qu’en cas de conflit, la Chine devra affronter 2 nations disposants de l’arme nucléaire, chacune de ces dernières pouvant la détruire. Mais même si Biden décide de ne pas fournir de missiles nucléaires à l’Australie, le simple fait que la marine australienne soit capable de repérer et de couler des sous-marins chinois et leurs bateaux de guerre est un changement majeur dans l’équilibre des pouvoirs de la zone Pacifique. Le général qui devra expliquer cela au président chinois Xi Jinping doit s’inquiéter de cette ancienne tradition chinois qui voulait que l’empereur faisait exécuter les messagers qui transportait des messages qui lui déplaisait.

Pour en revenir à l’information qui fait la Une, même si Biden est un grand supporte de l’OTAN, il va probablement désormais passer plus de temps avec le « Quad » (USA, Australie, Japon et Inde) : 4 pays puissants qui vont travailler de concert pour contrôler la Chine de la même façon que l’OTAN a été créé pour contrôler l’URSS. Négocier avec des élus nationaux de gauche (la Squad*) est vraiment du pipi de chat quand on compare cela avec la gestion de l’ascension de la Chine.

L’accord s’est également fait avec les anglais d’où l’acronyme « AUKUS ».*** Cela montre que, même dans une Europe post-Brexit, travailler avec les anglais dans des domaines militaires, d’espionnage et technologiques vitaux est plus important pour Biden que d’apaiser ses relations avec la France. Cela montre également que l’Australie préfère servir d’usine de l’Amérique en devenant son partenaire stratégique que d’être celui de la France. C’est aussi la première fois que les USA partagent leur technologie nucléaire avec un autre pays que l’Angleterre. Cet accord renforcera la position de Boris Johnson et de Scott Morrison, le premier ministre australien, et affaiblira Macron. C’est ainsi.

En ce qui concerne la scène politique américaine, si l’on considère que les affaires internationales comptent ne serait ce qu’un peu, cet accord et les futurs réunions avec les leaders des autres pays du Quad rendra très complexe pour les Républicains de dépeindre Biden en président faible contre la Chine. En cas de tentative, sa réponse serait alors : « J’ai vendu à notre allié australien une partie des armes les plus destructrices du monde afin d’envoyer un message clair aux chinois : vous n’êtes pas les seuls avec du pouvoir dans le Pacifique Ouest ! ». En plus, cet accord va créer des milliers d’emplois qualifiés pour les entreprises qui seront sélectionnées pour construire les sous-marins. En comparaison de cette grande victoire, la débâcle afghane ne pèsera plus grand chose. On n’a pas 44 ans de carrière en politique sans avoir appris les règles du jeu.

* Le titre fait référence à la « Squad » qui est le nom qui a été donnée en 2018 à un groupe de représentantes de couleurs issues de la branche la plus progressiste / de gauche du Parti Démocrate et popularisée par des attaques de l’ex-président Trump à l’époque. Plus d’infos sur Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/wiki/The_Squad

** Désolé…

*** AUstralia, UK, US